Madagascar
Ifaty, Madagascar, décembre 2010
Au tournoi d'Ifaty, à Madagascar, une photo peut résumer à elle-seule l'esprit de l'Eco-Sys Action Football Cup (EAFC).
Une séance de pénalties hors du commun ; les spectateurs forment un cercle quasi parfait autour du but et des joueurs, unis dans la même émotion sur cette « planète football » ; la ferveur monte, la finale va se décider sur un dernier tir ; le joueur va bientôt s’élancer dans le sable encore brûlant, le ballon montera, trop haut, trop loin, il manquera la cible ; mais peu importe, c’est la beauté du sport en un cliché, la victoire des tortues et de la nature, l’espace d’un week-end, peut-être plus. Aujourd’hui, il n’y a pas de perdants.
L'Eco-Sys Action Football Cup (EAFC), c'est la fête sportive de la nature, et à Madagascar, elle est partie intégrante de la vie quotidienne. A titre personnel, si je devais résumer en un mot ce voyage à Madagascar, ce serait les quatre lettres du mot « B.O.I.S ».
Après le Kenya (Tournoi des Guépards) et la Guyane (Tournoi des Caimans noirs), c’est vers Madagascar, haut lieu de la biodiversité mondiale, que l’Eco-Sys Action Football Cup (EAFC) s’est tournée. Après un tournoi très remarqué au cœur de la capitale, Ifaty a accueilli la Coupe EAFC des Tortues Sokake.
En partenariat avec l’Association Salamandra Nature, organisatrice des deux tournois, l’EAFC a souhaité sensibiliser la population locale au pillage de ses richesses.
Moins connue que les lémuriens, la tortue radiée (Asterochelys radiata) est l’un des joyaux du patrimoine naturel malgache. Elle est malheureusement très fortement menacée par la destruction de son habitat, la consommation locale de sa chair et de plus en plus le trafic à l’export vers l’Asie.
Gwen Rakotovao, Miss Madagascar 2009, et Sophie Perrichon, représentante de l’équipe féminine du Paris-St-Germain, étaient les marraines des deux tournois. Plusieurs artistes de renom se sont également succédés pour un programme musical de qualité, créant une atmosphère aussi sportive que festive rythmée par le très bel hymne à la nature malgache écrit par Bana, et interprété par Hanta et Dama (Mahaleo).
L’EAFC, c’est la fête sportive de la nature, et à Madagascar, elle est partie intégrante de la vie quotidienne. A titre personnel, si je devais résumer en un mot ce voyage à Madagascar, ce serait les quatre lettres du mot « B.O.I.S ».
Entre Antananarivo et Ifaty, j’ai vu beaucoup de bois : au marché, sur des camions énormes, étendu le long de la route, mais de forêts saines, d’autres oiseaux, très peu.
La faune et la flore malgache sont en effet soumises à une pression extrême. Il ne reste aujourd’hui que 10% de la forêt d’origine, et 300 000 hectares disparaissent encore chaque année. A ce rythme de déforestation aussi élevé, on peut parler de catastrophe humaine et écologique. Outre la disparition irréversible d’espèces endémiques, l’île connait une érosion terrible, un épuisement des sols, un ensablement des fleuves et une modification climatique entraînant une désertification accélérée et de plus en plus perceptible.
L’espace de deux week-ends et d’une communication locale et nationale (animation, journaux, magazines, radio, télévision, internet), la tortue radiée est donc devenue l’ambassadrice d’une nature maltraitée. Sa forêt disparait, elle aussi, nous aussi.
Sans arbres, Madagascar va devenir une zone aride où l’eau deviendra trop abondante ou trop rare selon les saisons et les années. Le phénomène est déjà impressionnant dans d’autres pays africains où la forêt a été rasée, comme en Ethiopie, et je suis là pour le certifier. Madagascar pourrait alors devenir très rapidement le symbole même du dérèglement climatique international, et d’un gâchis exceptionnel en matière de biodiversité.
Les solutions existent (arrêt des cultures sur brûlis, protection intégrale de la forêt restante, alternatives au charbon de bois, établissement de corridors écologiques, etc.) mais demandent une prise de conscience générale et quasi immédiate. Trop peu de malgaches comprennent que leur destin est lié à celui de la nature. J’ai pu noter la fierté des habitants pour leur environnement doublée d’une certaine méconnaissance de la situation, et même une ignorance de leur vraie richesse nationale. Il n’est pas tout à fait trop tard pour agir, mais le poids de cette action de dernière minute repose sur les épaules de cette génération d’enfants qui a pris tant de plaisir à jouer lors de l’EAFC, de mes petits amis, de vos enfants !
L’impact de l’EAFC ne peut être mesuré sur une aussi courte période. Ces tournois ont besoin de se pérenniser, de s’étendre à d’autres régions et surtout d’avoir la possibilité de mettre en place des actions sur le terrain, et prouver aux populations locales, que protéger est plus rentable que détruire.
Pour cela, Eco-Sys Action a exactement la même vision que Salamandra Nature et souhaite rassembler un maximum d’acteurs associatifs. L’éco-village lors du tournoi d’Antananarivo, a démontré cette volonté de partage ; d’ouverture également car Eco-Sys Action n’a pas de couleurs religieuses ou politiques. Les solutions doivent être locales et solidaires. Madagascar doit prendre son destin en mains sans attendre d’aide extérieure. Ce pays est extraordinaire de diversité et de richesses, et c’est cependant très souvent un manque de confiance et un découragement chronique qui ressort de discussions diverses que j’ai pu entendre ici et là. Qui peut bien donc créer la dynamique nécessaire à la sauvegarde du patrimoine naturel ?
Ma réponse de petit moineau peut paraître à la fois candide et puissante et figure déjà ci-dessus : les enfants. Ce sont eux les meilleurs prescripteurs vers les adultes. Eux encore qui ont le pouvoir de dire « stop » et de se faire entendre. Mais pour cela, nous nous devons de les aider, de faciliter leur vie quotidienne, de leur expliquer, de les éduquer positivement. L’environnement n’est pas leur souci principal, leur quotidien étant souvent beaucoup trop compliqué, mais doit devenir leur force. C’est le pouvoir des enfants malgaches qui décidera du destin de Madagascar, et pourra inspirer d’autres enfants de d’autres pays.
Nous nous devons de permettre à une génération d’enfants non seulement d’être l’inspiration d’aujourd’hui, mais de devenir les décideurs de demain.
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