Salama, Kenya, Octobre 2011

 

La « bataille » des guépards

 

Survoler la région de Salama n’a rien d’encourageant pour la survie du guépard au Kenya, et pourtant…

Lors de ma première visite ici il y a plus de cinq ans, le paysage était beaucoup plus homogène, plus régulier. Mais les grands ranches disparaissent peu à peu, sous-divisés par l’administration, envahis illégalement par de plus en plus de personnes à la recherche de nouvelles terres. Mais où sont donc les gigantesques euphorbes sur lesquels j’aimais me poser il y a quelques mois seulement ? Coupés, comme beaucoup d’autres arbres.

 

Après sa rénovation, le Mombasa Highway, qui traverse cette zone, est de plus en plus fréquenté, sans parler de la vitesse excessive des voitures et des nombreux camions l’empruntant. Et voilà que la construction de la Technopolis de Malili avance à grands pas.

 

D’après mes amis à Action pour les Guépards au Kenya, qui continuent leur suivi satellite et leur inlassable travail auprès de la population locale, plusieurs guépards ont malheureusement été écrasés ces derniers mois en tentant de traverser la route.

La situation n’est pas non plus très brillante pour les gens ici. La sécheresse, comme dans toute la corne de l’Afrique, a frappé très durement une terre déjà fragilisée par des pluies irrégulières. La mauvaise gestion de l’eau, les mono cultures trop fréquentes et la déforestation ne donnent que peu de chances pour combattre le manque d’eau chronique.

 

Pourquoi alors croire en la survie des guépards ici ? Personnellement, du haut de mes quelques centimètres,  je pense que l’avenir de l’homme et celui de ce si beau félin sont très étroitement liés à Salama.

 

La disparition du guépard ne présagerait de rien de bon pour la communauté locale. Elle signifierait la destruction irrémédiable de l’éco-système, et la porte encore plus grande ouverte à l’érosion des sols, au manque d’eau et à une désertification progressive. Une misère encore plus insoutenable pour des familles déjà éprouvées par des conditions difficiles.

 

Pour les guépards, si la « bataille de Salama » est perdue, cela voudra dire que son habitat se réduit encore, comme dans le nord du Kenya où les gens connaissent la date du dernier guépard aperçu, colline après colline. Pour un animal comme le guépard qui ne peut pas survivre seulement dans les parcs nationaux à cause de la concurrence des autres prédateurs, c’est une course contre la montre pour ne pas disparaitre au Kenya, et elle commence ici même à Salama.

 

Il faut donc espérer que Salama pourra garder son rôle de corridor écologique, et que les enfants de ce territoire en pleine évolution auront la volonté et les coups de pouce nécessaires pour prendre leur destin en mains, là où leurs parents ont échoué. Nous avons discuté de plusieurs solutions avec les gens ici, mais il faudra se battre pour qu’elles deviennent réalité, et renversent la tendance destructive actuelle.

 

Mes amis guépards confirment la situation extrêmement critique et stressante de leur vie à Salama, surtout avec des jeunes à élever. Ce matin, j’ai laissé une de mes petites plumes orange près du plus jeune, Tumaini (« Espoir » en langue swahili). Il a joué avec, et puis elle s’est envolée, loin, vers les hommes, comme un message secret, un SOS.

 

 



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