Une nouvelle étonnante me parvient alors même que je suis en vol pour Donsol, l’une des capitales mondiales des requins-baleines : un requin grande gueule (Megachasma pelagios) a été découvert au Mexique, le 52ème seulement depuis la première observation de cet animal mystérieux en 1976 à Hawai.
Il y a deux ans, le n° 42 avait été pris à 200 mètres de profondeur dans les filets de pêcheurs et ramené à Donsol. Mesurant plus de 4 mètres pour 500 kg, il n’avait pas survécu à ses blessures et avait été mangé en « kinuout », une recette locale à la noix de coco, très souvent malheureusement à base de raie manta. Pour ce qui aura sans doute été l’un des repas les plus rares du monde, ce spécimen fut perdu pour la science. C’est l’un des pêcheurs qui m’avait raconté cette histoire exceptionnelle.
Le requin grande gueule est en effet méconnu. Il semble qu’il passe son temps à près de 1 000 mètres de profondeur avant de remonter vers la surface pour se nourrir de planctons, méduses et autres petits poissons. Tout comme le requin-baleine et le requin pèlerin, il filtre son alimentation. Il doit son nom à sa gueule immense (jusqu’à 1m30 de large), qui est agrémentée de toutes petites dents.
Plusieurs symboles entourent cette prise très rare à Donsol. Tout d’abord, il est indéniable que l’on ne connait que très peu les profondeurs de l’océan et les animaux mystérieux qui les peuplent. Mais c’est aussi la preuve des dégâts causés par les filets dérivants sur toute la faune marine sans distinction. Les requins-baleines en sont trop souvent les victimes. Sur une note plus positive, la richesse sous-marine de Donsol ne fait plus aucun doute. Cette région possède une biodiversité incroyable qui doit être conservée, un trésor à protéger précieusement au plus vite. Les requins-baleines ne se sont pas trompés en utilisant Donsol comme un point important de leur migration annuelle.
Il est grand temps d’aller raconter cette histoire aux enfants des écoles de Donsol et de la province de Sorsogon. Ils ne savent encore que très peu de choses sur cette dimension marine qui les entoure et qui reste un endroit mystérieux à leurs yeux. On ne protège souvent que ce que l’on connait !
Un petit tour à la rencontre du requin grande gueule :
Cherbourg, France, août 2010
Océan, entre disparition et espoir
Aujourd’hui, j’accompagne un vol de goélands. Ils me montrent l’étrange architecture de la Gare Maritime de Cherbourg, dans le nord-ouest de la France, en Normandie.
Les grands paquebots comme le Queen Mary 2 viennent encore de temps en temps faire revivre le passé époustouflant de ce bâtiment chargé d’histoire. Même le Titanic a fait escale au large avant de sombrer au milieu de l’Atlantique.
Je laisse mes amis dehors après le survol de plusieurs petits sous-marins scientifiques tous plus rigolos les uns que les autres, car nous sommes ici à la Cité de la Mer, un bel endroit pour les amoureux de la mer. C’est l’exposition du film « Océans » qui m’intéresse, et l’une des scènes clé du film a même été tournée ici.
Les gens semblent fascinés, surtout les enfants, et me remarquent à peine. Je prends mon temps pour regarder les vidéos et suivre sur la carte géante les 54 sites du tournage de ce film magistral.
Mon ami, François Sarano, qui a été l’un des premiers à croire en Eco-Sys Action et fait partie de notre conseil d’experts, a largement contribué à ce film. C’est lui qui se présente seul devant un grand requin blanc, et nage avec. Quelle scène grandiose qui parle d’elle-même sur la plus grande tolérance que nous devrions avoir envers les requins ! Admirable et émouvant quand François nage avec ce « monstre » marin. On sent sa passion pour la mer, et il devient, par la même occasion, l’un des meilleurs ambassadeurs des requins.
Encore des émotions fortes en voyant cette reproduction grandeur nature d’une rythine de Steller. Pas très connu cet animal, n’est-ce pas ! Et pour cause puisqu’il a été massacré au XVIIIème siècle pour sa chair, sa graisse et sa fourrure. Ce cousin géant des dugongs vivait en Arctique, près du détroit de Béring, mais n’a pas survécu à la pêche intensive dont il a fait l’objet. Et ce phoque moine des Caraïbes ? Disparu ! Et cette tortue marine ? A protéger le plus vite possible !
On se dira qu’il y a bien longtemps de cela, mais malheureusement les choses n’ont pas changé et se sont même accélérées. Il y a deux ans, par exemple, le dauphin baiji du Yang Tsé Kiang était déclaré disparu, lui aussi.
Alors, en me posant sur cette rythine de Steller si symbolique, je me rappelle le message d’ « Océans » : « la terre ne nous appartient pas, elle est à partager. Tout est possible ».
Un petit lien pour savourer la bande-annonce du film :